Les requins

 


SOS (Save Our Sharks) : Sauvons nos requins

Mise à jour : 2004/02/28

requin gris photographié à Rangiroa
Requin gris (carcharhinus amblyrynchos) photographié à Rangiroa © 2002 François Battail

Des nouvelles alarmantes en provenance de Polynésie, relayées sur la liste de discussion mondiale Shark-L indiquent que le finning y serait sans précédent.


28 février 2004
Malgré une annonce publique du Ministre de l'environnement  sur Tahiti Presse le 18 septembre 2003 :

Mettre un terme à la commercialisation des ailerons de requins

Le ministre de l'Environnement a déclaré, par ailleurs, qu'un arrêté allait être pris très prochainement par le gouvernement de Polynésie française pour mettre un terme à la commercialisation des ailerons de requins. La gendarmerie a ouvert une enquête sur ce sujet devenu préoccupant à la suite de véritables massacres de requins dans l'archipel des Tuamotu.
Force est de constater que le texte de loi n'est toujours pas sorti. Il est donc nécessaire de continuer à faire pression sur le gouvernement polynésien pour qu'il tienne sa promesse, l'un de ces moyens est de signer aujourd'hui la pétition de Longitude 181.

En 2004, une nouvelle étude limitée au golfe du Mexique est sortie.
Extrait de l'étude
Cette publication de Science étant soumise à copyright je ne peux pas reproduire le contenu
En 2003 l'étude de Julia K. Baum & al : Collapse and Conservation of Shark Populations in the Northwest Atlantic révèlait une réduction comprise entre 50% et 90% des populations de requins sur une période de 50 ans a fait grand bruit, on murmurait que les requins pourraient être menacé d'extinction.
Cette nouvelle étude ciblant spécifiquement des requins pélagique (carcharhinus longimanus et carcharhinus falciformis) indique une réduction de population comprise entre 90 et 99% sur 50 ans ; tout en sachant que les États-Unis ont depuis la fin des années 1990 place une loi interdisant le finning...
Sachant que l'ONU a émis la résolution A/RES/58/14 qui là aussi ne peut que constater l'étendue des dégâts et solliciter que le plan IPOA Shark de préservation des requins de la FAO soit mis en place très rapidement.
Il commence à y avoir beaucoup d'espèces de requins (et de raies) qui font partie de la "red list"c'est-à-dire la liste des espèces menacées d'extinction (cette liste est loin d'être exhaustive par manque de données).
 
La Polynésie représente 4,5 millions de km2, protéger les requins sur une zone aussi vaste et soumise à une même législation est certainement un moyen de contrer l'extinction inexorable des requins.

paysage polynésien : le lagon bleu à Rangiroa
Paysage polynésien, le lagon bleu à Rangiroa où il est encore possible de voir des dizaines de requins © 2002 François Battail

Cette "pêche" consiste à découper les ailerons sur le requin vivant et à rejeter tout le reste à la mer. Ce qu'il reste du requin agonise sur le plancher océanique pendant plusieurs jours privé de toute locomotion.

couverture du journal La Dépêche de Tahiti

Tout cela pour la soupe aux ailerons de requin. Pour une fête en Asie environ 40 requins sont massacrés et 95% de la masse des requins est perdue alors que les ressources de la mer s'épuisent et que les requins sont en voie de disparition. C'est simplement scandaleux et injustifiable, d'autant plus que l'origine de cette soupe était de prouver sa bravoure en tuant un requin (généralement de petite taille). Et voilà maintenant comment se passe cet "affrontement" Vidéo format Quick Time (3,35 Mo).

D'un point de vue économique le commerce des ailerons de requin n'est pas un Eldorado mais simplement suicidaire, jugez plutôt :

(*) Et je ne suis pas un cas isolé ; de plus des équipes de tournage viennent souvent à cause des requins (en novembre 2002 c'était Jean-Michel Cousteau avec Christian Pétron, une équipe d'Ocean Futures, deux cameras sous-marines de 40 kg, 15 jours de tournage, un hélicoptère loué).

(a) ou (b) ?

La solution (a) n'est pas vraiment une façon de développer l'économie locale... et le finning avec son rendement de 5% (masse "utile" / masse péchée) appauvrit les océans et les récifs à une vitesse affolante ruinant l'écosystème et donc à très court terme le tourisme.

En août 2002, 15 tonnes d'ailerons ont été saisies sur le "King Diamond II" dans les eaux d'Hawaï représentant le massacre de 18000 requins dans une zone géographique réduite et en quelques jours seulement. Il aurait été impossible pour ce bateau de stocker les 18000 corps, tout au plus 2000. Ce faisant tous les requins de cette zone sont morts, bien sûr tout aileron est bon à prendre : requin de 30 cm ou femelle de 3 mètres allant mettre bas.
Le cycle de développement du requin est extrêmement long comparé aux autres poissons :

Le finning est donc certainement le moyen le plus efficace d'exterminer les requins qui après 400 millions d'années d'évolution ont trouvé l'apex prédateur suprême : la cupidité (quelques siècles d'existence).

Nous (des individus du monde entier essentiellement en relation par Shark-L et ayant en commun la passion des requins, hors de tout contexte associatif, politique ou autre) tentons de faire pression sur le gouvernement polynésien pour qu'il légifère et interdise cette pratique honteuse du finning afin que des endroits comme Rangiroa, Tikehau, Manihi, Fakarava, Huahine, Moorea... puissent rester des sanctuaires marins où l'on rencontre des requins dans leur milieu naturel à chaque plongée.

La destruction des requins a des conséquences extrèmement graves sur l'ensemble de l'écosystème marin et qui se traduit par une diminution des autres espèces et la décrépitude des récifs. Le requin est un élément clé de la chaîne alimentaire. Toutes les études scientifiques récentes indiquent une diminution moyenne sur 15 ans de 50% des populations mondiales de requins et pour certaines espèces plus de 90%. La situation n'est plus alarmante mais critique.
Et pourquoi la Polynésie aujourd'hui ? Je cite Monsieur Bernard Séret, spécialiste des requins, qui a eu la gentillesse de me répondre et qui apporte une réponse malheureusement trop évidente à cette question :

Les zones de pêche aux requins s'appauvrissant les unes après les autres, les efforts se portent actuellement sur les zones qui avaient été épargnées jusqu'à présent, sans doute à cause de leur éloignement des filières commerciales, comme la Polynésie.

Ma lettre ouverte envoyée au gouvernement polynésien se trouve sur ce forum.

Vous trouverez également la pétition sur le site de Longitude 181 qui a aussi rédigée la remarquable Charte du plongeur responsable.


Merci à Ila France Porcher pour ses actions sur place et qui craint de perdre ses melanopterus (requin à pointes noires) tant aimés. You're not alone Ila.
Remerciements au Raie Manta Club de Rangiroa en particulier à Lydie et à Yves Lefèvre, à Didier Alpini président du GIE plongée Tahiti à Christine Causse et Jean-Michel Cousteau d'Ocean-Futures.
Merci à Renée et Jean-Paul Messager de la Dépêche de Tahiti pour leurs reportages et pour leur aimable autorisation de publication.
Crédit : merci à Alex "The Sharkman" Buttigieg pour l'autorisation de publication de la sinistre vidéo de finning.


Merci à tout ceux qui prendront la peine d'écrire au gouvernement polynésien et qui considèrent qu'un requin vivant a plus de valeur économique et écologique qu'un bout d'aileron dans de l'eau tiède.




Après avoir lu des dizaines de livres sur le sujet, vu plus d'une centaine de requins (des petits il est vrai : moins de 3 mètres) ; il me semble que l'on connaît très mal ces poissons. L'information délivrée au grand public l'est souvent dans un contexte tragique qui conforte le requin dans sa position peu enviable de victime expiatoire de tous les maux dont l'origine est d'ailleurs plutôt humaine. Ma modeste participation tentera d'établir quelques faits et réalités et de poser quelques questions au vu d'études pour le moins contradictoires.

 

Quelques ordres de grandeur

En sachant que souvent sont comptabilisées parmi les victimes des requins les attaques provoquées (pêche sous marine avec le poisson pêché attaché au corps, tentative de pêche d'un requin...) ces chiffres rapportés au pourcentage de la population mondiale vivant en milieu côtier sont quasi-nuls.

Sur les (très approximativement) 450 espèces de requins recensées une grande majorité ne dépasse pas 1 mètre à l'âge adulte, de plus une bonne partie de la population des requins vit à une profondeur qui nous est inaccessible.

Il y a des requins dans toutes les mers du monde, un requin d'un mètre et de 15 kilo a plus de force que vous dans l'eau et peut tuer (par noyade) : si les statistiques de rencontres hommes / requins étaient tenues par les requins elles seraient beaucoup plus élevées, le requin peut vous détecter à plusieurs kilomètres (son et odorat à longue distance, vue et variation de champ électrique à moyenne / courte distance).

 

A éviter

Un requin est un animal sauvage, optimisé par 250 millions d'années d'évolution, lorsqu'il décide/doit passer à l'attaque il est efficace. Souvent l'homme n'est pas la proie primaire mais la proie involontaire (poissons pêchés tenus à proximité du corps, surfeur qui vu d'en dessous ressemble à une otarie...). Comme tout animal sauvage il convient de ne pas faire n'importe quoi (même quand on est photographe), se documenter aide d'une part à avoir une idée du comportement et permet de déterminer les conditions optimales d'une rencontre (ou d'une non-recontre !). Que vous soyez à la recherche de requins ou qu'au contraire vous vouliez les éviter à tout prix voici quelques règles, bien évidemment non exhaustives et non garanties, mais qui en milieu tropical devrait vous éviter une rencontre avec un tigre ou un bouledogue :

 

Contact !

Si vous avez la chance de voir un requin - même depuis une plage ou un débarcadère - admirez le et considerez vous comme chanceux(se) ; c'est un spectacle rare. Dans l'eau gardez votre calme. Essayez d'évaluer la taille du requin et si ce requin vous apparaît sensiblement plus grand que vous et que vous êtes en bordure de plage revenez immédiatement mais calmement en ne perdant pas le requin de vue. Le plus souvent le requin sera tellement effrayé par sa rencontre qu'il fera demi tour et sera hors de portée visuelle en quelques secondes. Certains endroits dans le monde sont "infestés" de requins ; pourtant vous pouvez y passer une semaine et y voir des Napoléons, des raies léopard (eaggle ray) et pas un seul requin (ça m'est arrivé aux Maldives) !

 

Pourquoi des attaques ?

Le requin et l'homme ne vivent pas dans le même milieu, autant l'homme n'est pas à l'aise dans le milieu marin autant le requin n'a pas un régime alimentaire où l'homme est inscrit au menu ; mais le fait que les bateaux vident leurs ordures à même la mer ou à proximité des côtes pousse certains requins dangeureux (sans régime alimentaire spécifique : essentiellement le bouledogue et le tigre) à devenir sédentaires (le taux d'attaque augmente proportionnellement à la fréquentation des bateaux dans un endroit donné). En pleine eau, bien que les océans soient vastes et profonds, une "nouvelle" se transmet très vite : comme une ombre à la surface qui occulte le soleil. Un requin pélagique (vivant dans l'océan) sera attiré alors par sa curiosité ; le requin est un fin gourmet et même si une proie potentielle correspond à ses critères (peu de risque de contre offensive, taille compatible...) il tentera d'y goûter avant d'inscrire ce nouveau met à sa liste de courses. Même si le requin ne vous apprécie pas culinairement - c'est ce que les études tendent à prouver - la morsure infligée risque d'être fatale pour cause de rupture d'artère (un blanc exerce une pression de plusieurs tonnes par centimètre carré !).

 

Des doutes

Certains auteurs évoquent le fait que des couleurs vives comme l'orange ou le jaune pourrait attirer (dans le mauvais sens du terme) les requins ; c'est curieux parce que les Nikonos V (appareils photo amphibie) sont à forte dominante orange, mon flash Ikelite est de la même couleur et mon caisson Huggyfot est jaune ! Bon nombre d'équipement de plongée sont de couleur 'flashy' afin de pouvoir les voir plus facilement en cas de perte sous l'eau. Beaucoup d'études montrent que les attaques de requins se produisent plus fréquemment lorsque l'eau est chaude, entre 9h-12h et 14h-17h et plutôt en fin de semaine... c'est ridicule et revient à dire que plus il y a de gens dans l'eau, plus la probabilité d'une attaque de requin augmente. La nomenclature des requins est source de confusion et ne facilite pas l'identification des espèces ; ainsi le requin taureau (carcharias taurus) est qualifié par les anglos-saxons de 'sand tiger shark' [requin tigre de sable] ce requin placide au délit de sale gueule est majoritairement classé dans la rubrique 'peu de danger pour l'homme' mais est souvent assimilé au requin tigre à cause de la confusion engendré par ce nom et tué sans discernement. De même bon nombre d'attaque ont été attribuées au 'requin du Gange' alors qu'il s'agissait du requin bouledogue ; l'un des rares requins capable de vivre dans des fleuves.

 

En résumé

 

En savoir plus

Tous les requins du monde, 300 espèces des mers du globe, Géry Van Grevelynghe, Alain Diringer, Bernard Séret, Editions Delachaux et Niestlé, ISBN 2-603-01148-0.

Précis et sérieux, une série d'articles très documentée et la nomenclature la plus fournie me semble-t-il à ce jour. Bref un ouvrage de référence.

Requins en liberté, Gérard Soury, Editions Nathan, ISBN 2-09-260544-5.

Je dois avouer qu'au début j'étais déçu : "Encore un livre sur les requins : familles, biologie, comportement..." mais je suis un peu blasé... et puis vient la deuxième partie : un tour du monde des requins réalisé par l'auteur avec l'ambiance, les galères et les situations délicates, du vrai sans fioriture. Je ne peux que conseiller ce livre pour se faire une idée du monde des requins, le passionné de requin le voudra également dans sa bibliothèque de toutes façons des livres sur les requins il y en a nettement moins que des livres sur les dauphins !

Les requins, Angelo Mojetta, Editions Gründ, ISBN 2-7000-3420-1.

Ouvrage de vulgarisation. Bien réalisé, sauf que le requin bouledogue n'est quasiment pas mentionné et pourtant il partage sa place de numéro 2 avec le requin tigre en matière de danger, donc savoir à quoi il ressemble peut avoir un intérêt.

Requins, les seigneurs de la mer, Gaetano Cafiero, Maddalena Jahoda, Editions Gründ, ISBN 2-7000-5454-7.

Le blanc en couverture ça attire l'oeil (et ça fait vendre), donc c'est avec un a priori un peu négatif que j'ouvre ce livre et là le choc ! Les plus belles photos des meilleurs photographes sous-marins, rien que pour la photo de la page 36/37 (blanc au fisheye pris à l'extérieur de la cage ?), celle de la page 42/43 (tigre au 20mm pris de vraiment pas loin), celle de la page 54/55 (grand marteau), c'est à acheter absolument, quant au texte il est sous la forme d'articles thématiques et à la fin on trouvera traditionnellement une présentation de la classification et quelques planches de description.

Squales, Jeff Rotman, Editions ipo facto, ISBN 1-893263-02-9.

Reccueil de photos dont tout une série de photo en macro (oeil de requins, dents...), en photo sous-marine le téléobjectif n'existe pas et pour faire ces photos Jeff Rotman a dû parfois s'approcher à moins de 35 cm sans faire fuir le requin en faisant la mise au point à la main tout en sachant que dès lors que les flashs se déclencheront le requin s'enfuira certainement, il n'y donc qu'une seule prise possible. Quel travail et quel résultat.

Requins, Doug Perrine, Editions Nathan, ISBN 2-09-291070-8.

Un magnifique ouvrage de vulgarisation et en plus pas cher (10 Euros) ! Ca commence par le récit de l'expérience personnelle de l'auteur, un peu de biologie et de comportement et une série de planches illustrées par les somptueuses photos de Doug Perine. On reste un peu sur sa faim d'autant plus qu'en 25 ans de photo sous-marine Doug Perrine doit avoir tout ce qu'il faut pour faire un magnifique livre avec un peu plus de pages (72) !